Analyse économique de la vie ++ - Réflexions sur la durée du droit d'auteur
Le droit d'auteur, et à vrai dire tous les droits intellectuels, reflète un compromis entre la nécessité de faire miroiter au créateur une rémunération pour les créations que l'on voit, et la nécessité de laisser l'information circuler librement de manière à permettre à de nouvelles créations d'émerger avec aussi peu d'obstacles que possible. Au cours du dernier quart de siècle ou à peu près, tous les paramètres du droit d'auteur ont été déplacés vers plus de protection, perturbant l'équilibre sous-jacent. La durée de protection s'étend bien au-delà de ce qui est nécessaire en pratique pour la très vaste majorité des créateurs, même si elle sert bien les besoins d'une infime minorité de grands joueurs détenant des droits d'auteur qui ont un certain âge mais continuent à produire des revenus. Cette situation résulte des principes tenus pour immuables dans les pays membres de l'Union de Berne : le droit est obtenu automatiquement, sans formalité et pour une période uniforme et de longue durée. Pour redresser l'équilibre sous-jacent au droit d'auteur, il faudra remettre en question ces principes et amener les créateurs individuellement à révéler la valeur qu'ils attachent à leur droit en le renouvelant, permettant que le droit glisse dans le domaine public s'ils n'y attachent plus de valeur suffisante. S'il est vrai qu'une telle approche réintroduirait des formalités dans le droit d'auteur, les avances techniques intervenues depuis leur abolition rendent l'accomplissement de ces formalités moins onéreux que dans le temps. Alternativement, on pourrait envisager une interprétation des exceptions équitables au droit d'auteur, comme le fair use ou l'utilisation équitable, de manière à les étendre à mesure que le droit d'auteur en question prend de l'âge. De telles approches auraient l'heureux effet d'éviter que le lobbying par les happy few entrainerait le verrouillage inutile de beaucoup de culture pour le commun des mortels.
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