Analyse économique des politiques informationnelles du gouvernement québécois
Le gouvernement du Québec souhaite apprécier les répercussions des technologies numériques sur l’effectivité de ses politiques informationnelles en lien avec la relation État-citoyens et l’optimisation de ses processus d’affaires. Le présent rapport s’enracine dans une méthodologie basée sur l’économie de l’information. Il fait état d’une recension qui a permis d’identifier et d’analyser une partie de l’instrumentation informationnelle — législative, gouvernementale et administrative — présente au sein du gouvernement du Québec. Sans prétendre à l’exhaustivité étant donné la complexité que représente cette instrumentation, cette recension a permis de faire ressortir les principales lacunes de l’instrumentation actuelle et quelques pistes de solutions pour remédier à la situation.
D’entrée de jeu, il a découlé de l’analyse la faible cohérence entre les différents instruments informationnels (ex. : lois sur l’accès ou la protection des renseignements personnels, politiques publiques sur les données ouvertes, politiques administratives sur la gestion des documents, directives, normes, guides, etc.) qui s’accumulent depuis plusieurs décennies ainsi qu’une très forte décentralisation des instruments de gestion de l’information. Ceci semble en partie le résultat d’une vision physique de l’information c’est-à-dire l’information conçue comme un objet à travers la production de documents auxquels on doit accéder, classer et archiver ou détruire. En ce sens, les instruments peuvent être groupés en trois sous-univers de problèmes : le partage des informations, la préservation des informations selon la durée et la valeur subjective et la gestion physique de l’information. L’arrivée des technologies numériques a remis en question cette conception de l’information. L’analyse a aussi fait ressortir que les instruments ont été créés pour répondre à des problèmes ou des défis ponctuels, mais sans nécessairement considérer l’information comme un problème public auquel la gouvernance et la gestion actuelles n’arrivent pas à répondre adéquatement. Pour pouvoir bénéficier pleinement des avancées technologiques en matière de transparence et d’optimisation des processus d’affaires, il faudrait considérer l’information comme un problème public général à régler au sens de Gusfield (2009). Celui-ci considère qu’un problème devient public lorsqu’il devient un enjeu de conflit et de controverse dans les arènes de l’action publique. Les dernières années nous ont permis de prendre la mesure de cette transformation en évolution à l’intérieur des organisations (Caron & Hunt, 2016) ou dans la société de manière générale (Han, 2015). Ainsi, il serait possible de concevoir un cadre de politique réfléchi autour d’une vision globale de l’information pour, ensuite, se doter d’instruments plus pointus empreints de cette vision. De plus, ce problème public devrait donner naissance à une définition plus claire et opérationnelle de ce qu’est l’information pour les organisations de l’État.
Découlant de la théorie de l’agence (Jensen & Meckling, 1976), plusieurs constatations sont également formulées en lien avec l’asymétrie de l’information entre le principal (citoyens) et l’agent (gouvernement). En plus d’éprouver des difficultés au niveau de l’accès à l’information, les citoyens ne sont pas informés de l’information qui est créée au sein de l’administration publique. Ainsi, l’agent décide de la valeur subjective de l’information à créer et à partager alors que l’information devrait être considérée et valorisée comme un bien public à partager. Finalement, bien que certains instruments récents commencent à inclure cette dimension, il est soulevé qu’il n’y a pas à proprement parler de lien entre les instruments et l’efficience organisationnelle.